Touchimbert. Louvois écrivait à l’intendant De Gourgues, le II novembre 1685 :

J’ai cru devoir vous donner part que les sieurs de Touchimbert frères, gentilshommes de la province d’Angoumois, de la R. P. R., étant venus ici faire des remontrances au roi, Sa Majesté a ordonné qu’ils fussent envoyés à la Bastille (Bullet., 3° sér., IV, 596).

Ces gentilshommes étaient François Prévost, sieur de Touchimbert et de Saveilles, marié en 1658 à Marthe Joly, et auquel on contestait en 1682 son droit d’exercice à Saveilles, et Casimir Prévost, sieur de L’Islot-Touchimbert, marié en 1657 à Marie de Robillard. Ces vieillards, dont le plus jeune était âgé de soixante-huit ans, avaient un autre frère, Charles Prévost, sieur de Brassac, marié à Catherine de La Rochefoucauld, qui ne lui donna que des filles d’après La France protestante. Casimir avait un fils et six filles, et François, deux fils, lieutenants de vaisseau, qui conservèrent leur grade à la Révocation, on devine à quel prix.

Le 25 décembre, Louvois autorisait le gouverneur de la Bastille à laisser communiquer avec MM. de Touchimbert et de l’Islot une personne qui devait se présenter pour affaires de la part de M. de Soubise (Arch: Bast., VIII, 360). Le 13 janvier 1686, Louvois écrivait encore à M. de Besmaus :

Le roi se remet à vous de faire ce que vous jugerez à propos pour la liberté que le baron de Touchimbert demande de pouvoir voir son frère et son fils.

Le 14, il autorisait l’entrevue de M. de Touchimbert et de M. de L’Islot; le 15, il ordonnait que M. de Touchimbert fût vu par son frère De Brassac, gentilhomme du Bas-Poitou récemment converti, dont les visites contribuèrent à amollir sa résistance. Le 29, Louvois invitait M. de Besmaus à donner à celui-ci l’assurance qu’on le relâcherait dès qu’il aurait abjuré (Ibid., 362, 364). M. de L’Islot en était exactement au même point. Les deux ordres de sortie furent signés presque en même temps: l’un, le 4 février; l’autre, le 7. Les prisonniers durent sortir ensemble le 9 ou le 10, après s’être engagés par écrit à faire abjuration dans la quinzaine (Ibid., 342, 365).

La cérémonie terminée, le sieur de Touchimbert se retira dans sa province et y vécut longtemps encore, mais toujours suspect en matière de religion. En effet, le 1er janvier 1700, le secrétaire d’État Barbezieux chargeait l’intendant D’Ableiges de l’informer de la conduite de ce nouveau converti (Ibid., 368). Le sieur de L’Islot, au contraire, s’établit à Paris, nous ne savons dans quelle intention. Le 23 mars, il allait à la Bastille solliciter M. de Cagny de suivre son exemple. Un État du 20 novembre 1686 mentionne, parmi les nouveaux convertis logés en la maison de la Tête noire dans le quartier de La Harpe, «le sieur de L’Islot-Touchimbert, gentilhomme proche de La Rochelle, qui a été à la Bastille et qui a abjuré entre les mains du P. La Chaise. Il a trois filles qui sont entrées dans la maison de Mme de Maintenon proche Versailles », c’est-à-dire à Saint-Cyr (Fr. 7051 fo 16). M. de L’Islot figure en 1692 sur une liste de suspects. Une demoiselle de Touchim fut tirée de Port-Royal par ordre du 14 septembre 1689 et conduite chez Mme de Miramion (O1 33). Le 7 mars 1695 (O1 39). Seignelay écrivait à la mère Garnier, supérieure des NouvellesCatholiques: «J’ai signé une ordonnance de 135,990 livres pour M. de Charenton, et cette somme lui sera payée en rentes sur l’hôtel de ville. Sa Majesté a ajouté à cette grâce qui est très singulière une pension de 500 livres pour Mlle de Touchimbert. Ainsi ils peuvent à présent conclure leur mariage. M. de Charenton ne pourroit (ne pouvoit ?) mieux faire que de choisir une demoiselle qui a reçu une si bonne éducation à Saint-Cyr et auprès de vous ». Le brevet de la pension est daté du II avril. Voir Prévost.

Source : La révocation de l’Édit de Nantes à Paris d’après des documents inédits, d’Orentin Douen.