Jean Callueau, 1er abbé-commendataire de l’abbaye de La Couronne (1515-1522).

Jean Callueau, ayant obtenu ses bulles de Léon X, se fit mettre en possession de l’abbaye, le 15 août 1515, par un notaire apostolique de Poitiers.

Nommé bientôt après évêque de Senlis, il prêta serment au roi, en cette qualité, le 16 mars 1516, et fit son entrée solennelle dans son église cathédrale, dédiée à Notre-Dame, le 1er février 1517. Dans le mois de mai, il assista au couronnement de la reine Claude à Saint-Denis. L’année suivante, Michel Bureau, abbé régulier de Saint-Pierre de La Couture, dans la ville du Mans, étant venu à mourir (6 juin 1518), François Ier, ne tenant compte ni de l’article du concordat qui l’obligeait à donner pour chefs aux abbayes des religieux de leur ordre, ni de l’opposition des moines bénédictins qui avaient élu, en place du défunt, Jean Bougler, prieur de Solesmes, préposa Jean Callueau à l’abbaye de La Couture et le fit deux fois commendataire.

Le Gallia christiana nous apprend que Jean Callueau employa les revenus de la mense de La Couture pour le bien du monastère, qu’il construisit les deux ailes de l’église ainsi que le cancel, et qu’il consolida l’édifice par quatre colonnes placées entre le chœur et l’autel ; abbatialis mensce proventus in utilitatem ipsius monasterii impendit, exstruxit ulramque alam ecclesiæ necnon cancellos, fulsitque œdificium quatuor columnis chorum inter et altare positis.

Nous aimons à croire que l’administration de Jean Callueau fut aussi avantageuse à Notre-Dame de La Couronne qu’à Saint-Pierre de La Couture. Nous savons qu’il fit achever et meubler les chambres hautes de l’hôtel abbatial et qu’il termina les voûtes de l’église, Plus de cinquante ans s’étaient écoulés depuis leur chute ; on voit par là que les travaux n’allaient pas vite à cette époque ; pour construire l’église tout entière, il avait autrefois suffi de trente ans.

Nous avions cru avec Boutroys que Jean Callueau avait obtenu de Louise de Savoie, dont il était l’aumônier et le chancelier, et même du roi, d’abondants secours pour continuer les restaurations ; c’est ce que pouvait faire supposer la présence des armoiries de François Ier et de sa mère sur quelques clés de voûte. Nous en doutons un peu depuis que nous avons vu le fidèle serviteur mettre sa bourse à la disposition de son maître et lui prêter successivement de grosses sommes, dont ses héritiers eurent bien de la peine à être payés. Le jeune roi, besoigneux et prodigue, employait son argent et celui de ses sujets à tout autre chose que des réparations d’église.

Grâce aux revenus de ses bénéfices, l’évêque de Senlis pouvait être généreux, et il l’était dans une certaine mesure. Il ne le fut pas seulement pour le roi et pour ses abbayes ; il n’oublia pas non plus sa famille. « Il jeta, dit M. Maulde, les bases de la fortune de sa maison, en même temps qu’il fit commencer (à L’Oisellerie) le grand bâtiment qui regarde le nord et élever cette élégante et gracieuse tour ronde qui en décore l’extrémité orientale ».

Au retour d’un voyage à Rome, Jean Callueau mourut à Lyon, le 29 juin 1522. Par son testament, il avait fondé quatre services solennels, à célébrer dans sa cathédrale, le lundi de chaque semaine des Quatre-Temps, et il avait laissé pour cette fondation 2,750 écus au soleil, du coin du roi, à prendre sur les 3,000 écus au soleil dont François Ier était débiteur à son égard. Il avait, en outre, légué à ses chanoines diverses créances montant à 2,148 livres 19 sols 4 deniers. Le chapitre fut obligé de soutenir, au sujet de ces legs, procès sur procès contre le trésorier royal, qui avait mis la main sur la succession de Jean Callueau, aussitôt après son décès.

(Société archéologique et historique de la Charente, 1887)